Comment ça marche ?

La philosophie

Dans la philosophie CLT, le terrain n’a pas de valeur marchande, et l’accès à un logement abordable et de qualité est un droit fondamental. Habiter ensemble sur un terrain commun ouvre de nouvelles perspectives et réseaux qui renforcent les ménages et les individus et participent à la construction de quartiers inclusifs et résilients. Le modèle CLT est une base solide pour développer de nouveaux modèles solidaires de logement qui peuvent répondre aux énormes besoins en matière de logements abordables ainsi qu’aux enjeux sociétaux tels que le vieillissement de la population, la gentrification, les besoins en matière de soins informels, ou la situation précaire de certains groupes.

Un terrain en commun comme base pour une ville plus durable et plus juste

Des collectivités du monde entier, confrontées aux contextes les plus divers, recourent aujourd’hui au modèle CLT afin de répondre aux enjeux du développement urbain. Les communautés rurales du sud des États-Unis l’utilisaient dans la lutte pour l’égalité des droits civils. Les résidents des quartiers informels des pays émergents l’utilisent pour régulariser leurs titres de propriété et conserver le caractère abordable de leurs logements. Les habitants d’un quartier fortement dégradé de Boston ont mis en place un CLT pour redynamiser leur quartier, tout en évitant les effets néfastes de la gentrification.  À Bruxelles, le CLTB développe des logements sociaux acquisitifs pour permettre aux familles à bas revenus de devenir propriétaires.

Ce modèle a en effet une valeur ajoutée pour toutes les parties :

  • L’investissement des collectivités est utilisé de manière durable et rend les logements abordables pour toujours pour les familles à bas revenus. L’idée sous-jacente est que lorsque de l’argent public est investi pour rendre un logement abordable, ce logement doit rester abordable pour toujours.
  • L’investissement des acquéreurs leur permet de se constituer un patrimoine et de sortir des difficultés liées à un logement inadapté et trop cher.
 

Deux CLT ont été récemment récompensés par le Prix Mondial de l’Habitat de l’ONU: le Champlain Housing Trust en 2008 et le CLT « Caño Martín Peña » de Porto Rico en 2016.

Un modèle en kit

Le “modèle CLT” n’est pas une formule rigide qui serait appliquée de la même manière en toutes circonstances, mais plutôt un «kit» dont les éléments de base peuvent être assemblés de différentes manières, en fonction de la situation locale.

 

Tous les CLT sont le fruit d’adaptation à leur contexte spécifique, mais ils partagent en général les caractéristiques suivantes, colonne vertébrale d’un CLT:

1. Modèle de propriété hybride

Le CLT acquiert des terrains pour les gérer dans l’intérêt de la communauté. Il s’engage à ne jamais se dessaisir de ces terrains. Les bâtiments sur ces terrains sont eux la propriété individuelle des résidents, ou dans certains cas d’une organisation, comme une association ou une coopérative.


Le terrain est donc une propriété collective (car le CLT est géré par la communauté), tandis que les bâtiments érigés dessus sont la propriété individuelle de leurs acquéreurs. Afin de permettre cette séparation horizontale de la propriété, les CLT des États-Unis utilisent généralement des contrats de location à long terme (lease). À Bruxelles, le CLTB utilise des droits démembrés, et essentiellement le droit de superficie. Le propriétaire de l’immeuble paie mensuellement un «loyer» ou une redevance au CLT pour l’utilisation du terrain.
La séparation de la propriété du terrain de celle du bâti rend le logement accessible dans un premier temps (les acheteurs n’ont pas à payer le prix du terrain), mais elle garantit aussi le suivi par le CLT des conditions spécifiques d’occupation ou de transmission des logements, par exemple lors de la vente de maisons.

2. Prix perpétuellement abordable

Il s’agit d’une caractéristique essentielle des CLT. Les acquéreurs bénéficient d’un coup de pouce pour acheter un logement à un prix abordable, mais ils s’engagent à transmettre ce coup de pouce lorsqu’ils revendront leur logement.

Les propriétaires de logements CLT peuvent donc vendre leur maison, mais à un prix plafonné: le vendeur pourra récupérer ce qu’il a investi, et un petit montant complémentaire. Cette limitation du prix de vente garantit que l’accès à la propriété reste abordable pour les acheteurs successifs, revente après revente.

En pratique, les CLT utilisent différentes formules pour déterminer le prix de vente. Les plus courantes les formules qui offrent au vendeur une fraction de la plus-value prise par leur logement, mais certains CLT proposent plutôt une indexation du prix de départ, voire des formules qui lient l’évolution du prix de vente au revenu moyen du voisinage. De manière générale, les formules visent à établir un arbitrage juste entre les attentes légitimes des vendeurs et le maintien de l’accessibilité des logements. En d’autres termes, ils veulent filtrer “l’intérêt non acquis” théorisé par Henry George.

3. Géré par la communauté

Les CLT sont des organisations ouvertes. Les occupants de logements CLT, mais aussi toute personne qui vit ou travaille dans le quartier où le CLT est implanté, peuvent devenir membre, participer au développement du CLT, et élire leurs représentants au Conseil d’Administration. En général, un tiers des administrateurs représente les résidents, un autre tiers les voisins et la société civile, et le dernier tiers l’intérêt public ou le gouvernement. Cette répartition équilibrée garantit la participation des résidents à la gestion, tout en assurant que les intérêts des habitants du quartier et l’intérêt général seront également respectés. Là encore, un juste équilibre entre les intérêts individuels et généraux est primordial.

4. Intendance

Une caractéristique finale est ce que l’on appelle l’intendance (ou stewardship) dans la littérature sur les CLT. Le CLT assume la responsabilité permanente des terres qu’elle possède et des logements construits dessus. Afin d’assurer la pérennité de son projet, le CLT a tout intérêt à ce que les maisons soient bien entretenues. Les CLT sont donc très engagés pour informer et encadrer les résidents. Les CLT veillent en général à ce que les acquéreurs d’un logement ne contractent pas de prêts toxiques, leur proposent des formations et les soutiennent si nécessaire. Les CLT sont les “développeurs qui ne s’en vont jamais“.

Ces caractéristiques permettent de tracer la définition suivante des CLT

Un Community Land Trust est une organisation sans but lucratif qui a pour mission d’acquérir et gérer des terrains en vue d’y créer des habitations accessibles pour des ménages ayant des difficultés d’accès à un logement ainsi, éventuellement, que des équipements d’intérêt collectif.

 

La vente se fera en dissociant la propriété du foncier de celle du bâti. Le CLT restera en permanence propriétaire des terrains. Les acquéreurs d’un logement CLT ont tous les droits liés à la propriété, mais acceptent des conditions d’occupation et de transmission spécifiques, afin de garantir que le logement sera toujours accessible pour le public-cible.

 

Toute personne résidant sur le territoire d’action du Community Land Trust peut en devenir membre. Le conseil d’administration est composé paritairement de représentants des habitants du CLT, des autres membres du CLT et des pouvoirs publics, afin d’assurer l’arbitrage entre les besoins des propriétaires et ceux de la communauté, en étant particulièrement attentif aux intérêts des générations futures.

Une grande diversité

Aujourd’hui, il existe de 500 à 600 CLT, essentiellement aux États-Unis et au Royaume-Uni. Des expériences avec ce modèle ont également lieu au Canada, au Kenya, en Australie, en France et en Belgique. Et ce qui caractérise le mieux ces CLT, c’est leur diversité. Certains sont actifs dans des zones rurales, d’autres dans des villes, certains se concentrent sur un seul îlot de maisons, d’autres couvrent une province entière. La plupart des CLT ne gèrent qu’une partie des immeubles situés sur leur territoire, mais il y a des exemples – comme le CLT de Caño Martín Peña évoqué en début d’article  qui les gèrent tous. Il y a des CLT qui ne construisent que du logement, d’autres qui développent toutes sortes d’autres fonctions, comme des magasins et des locaux commerciaux. Certains CLT ont 2 maisons dans leur portefeuille, d’autres en ont 3.000. Certains construisent, certains rénovent. Certains mettent des logements en location. Certains proposent des maisons, d’autres des appartements (ou des condominiums). Certains cherchent à toucher le public le plus démuni, d’autres la classe moyenne inférieure.

 

La manière dont les CLT combinent et appliquent les caractéristiques-types des CLT est également très variable. Rien qu’en Europe, il est frappant de constater à quel point les visions sont différentes en France et au Royaume-Uni. En Angleterre et au Pays de Galles, une grande importance est accordée à la dimension communautaire. La plupart des CLT sont des petites initiatives citoyennes, entièrement soutenues par des bénévoles, principalement dans les zones rurales. Souvent, ils ne possèdent pas le terrain sur lequel se développent leurs projets. En effet, en raison du système britannique de leasehold et freehold, certains terrains ne peuvent pas être vendus, mais uniquement cédés en “location”. En France, la situation est très différente. Les CLT sont encore très récents, mais ce seront probablement principalement les gouvernements urbains qui appliqueront le modèle. La participation des citoyens dans la gestion sera peu ou pas présente.  L’accent est mis essentiellement sur la séparation de la propriété du terrain et de la propriété des logements, afin de garantir de manière perpétuelle un prix abordable.

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